lundi 22 mai 2023

La désidérata de Marie Hélène Poitras

 

Publié chez Alto le 4 avril 2021

220 pages

Lu en format papier

4e de couverture

Sous le ciel aveuglant de Noirax sommeille une longue tradition de secrets qu’il faudra un jour détricoter. Dans la Malmaison, les pères entretiennent depuis longtemps le silence, nourrissent les panses et multiplient les désidératas: Pampelune, Héléna, la Pimparela, une lignée de femmes au destin tragique. Le père est rassuré ? le domaine est paisible, endormi. On a fermé la porte de la Maison aux parfums de crainte que la vérité s’en échappe. Son fils, Jeanty, de retour au bercail après une déconvenue amoureuse, entame sa propre quête identitaire. Aliénor, une femme qui compte bien changer le cours des choses, arrive à Noirax avide de réponses ? en même temps que la bougresse.

Mon avis

C’est le troisième livre que je lis de cette auteure et elle me surprend chaque fois. Je recommande de le parcourir à tête reposée, car l’écriture est complexe et vous risquez de devoir relire certains passages. J’ai bien aimé que l’action se déroule en France. Cela m’a permis de découvrir un univers en dehors de Montréal ou Québec. Je n’ai pas eu la chance de visiter ce pays, mais j’avais l’impression de vivre les mêmes sensations que les personnages. D’ailleurs, vous allez en rencontrer plusieurs, c’est une raison de plus de déguster chaque ligne.

Les prénoms sont originaux, j’aurais aimé avoir l’imagination de l’auteure pour trouver ceux des miens. Marie Hélène Poitras a mentionné dans une entrevue qu’elle avait visité la France pendant la création de ce roman et on remarque qu’elle avait pris de nombreuses notes. Que cela soit les animaux, les citoyens ou les habitations, on peut imaginer l’environnement avec tous les détails qu’elle apporte. Je ne dirais pas qu’il y en a trop pour décourager le lecteur, mais suffisamment pour stimuler notre imagination et observer son magnifique travail d’écriture.

J’avais parfois l’impression que les événements se déroulaient au 20e siècle, mais un passage concernant Jeanty qui se questionne sur son genre me fait douter de l’époque. À ma grande surprise,les ânes sont mentionnés à quelques reprises dans les premiers chapitres. C’est rare que j’en voie dans les autres romans, mais c’est une bonne idée pour différiencier l'oeuvre et cela allait bien avec l’univers. Vous allez aussi retrouver certains extraits de chansons qui ont bercé votre enfance. Je vous laisse découvrir lesquelles, mais je trouvais ça rafraîchissant.

Si vous ne connaissez pas encore l’écriture de l’auteure, je vous recommanderais de commencer par Griffintown. Par contre, si vous aimez la campagne française et que c’est un endroit qui vous inspire, je vous suggère celui-ci.

Extraits

La vérité, mon fils, c’est que je m’ennuie, à la longue, dans cette forêt, parmi les hardes de lapins, le fantôme de ta mère et la vue du moulin au loin. Le printemps a beau être revenu, l’hiver m’a semblé interminable. (p. 27)

Après, il fallait trouver le courage de se relever et de retourner voir le sculpteur dans le hangar pour qu’il soigne les coudes et genoux écorchés. Hélèna, la désidérata première, n’a pas été oubliée. Ni aucune de celles qui ont suivi. (p.35)

Tu cueilles les petites fraises des bois et glisses une mûre au bout de ton doigt. Le jus pourpre coule au bord de tes lèvres. Tu appelles ta mère en pleurnichant. Je vais réveiller le désir en toi au point où il te faudra changer de prénom. Tu te feras peur, tu t’égaieras, t’égareras et y prendras goût en devinant que ça ne peut pas durer éternellement. (p.62)

Avec la venue d’Aliénor à Noirax et à force de la côtoyer, Jeanty, déjà tenté par le déploiement de ses envies et la révélation de sa nature, a osé quitter sa pelure d’homme pour embrasser la femme en lui.

Jeantylle ne s’en cache pas, elle aime les demoiselles et les soldats. Avec l’âme et le cœur d’une désidérata, elle attend le retour de Malbrough.(p.112)

Mon entrevue avec l'auteure 

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