mercredi 19 janvier 2022

Soudain le Minotaure de Marie Hélène Poitras

 


Publié chez les éditions Alto le 18 janvier 2021

174 pages

4e de couverture

Édition vingtième anniversaire revue et suivie d’une postface de l’autrice Au tournant du millénaire, Ariane parcourt l’Allemagne, découvrant les traces de la barbarie des guerres. Elle cherche aussi à surmonter les séquelles d’une autre incarnation de la violence, une agression brutale à laquelle elle a survécu de justesse.

Au même moment, dans un pénitencier de l’Ontario, son assaillant macère dans la haine et la rage qui ont fait de lui un prédateur, naviguant entre pulsions et punition, entre ses fantasmes et ses mauvais souvenirs. Au son de Portishead et de PJHarvey, dans les rues d’un Montréal cru et vivant, ce roman-culte donne la parole aux deux acteurs d’une rencontre fracassante.

Loin de toute ambition moralisatrice, Soudain le Minotaure se lit comme une exploration frontale de la violence faite aux femmes. Une lecture qui se révèle, vingt ans plus tard, plus pertinente que jamais, plus déroutante qu’une avancée dans le labyrinthe d’un monstre.

Mon avis

Je vous avoue que je ne savais pas dans quel angle écrire cette chronique puisque l’histoire est bouleversante. J’avais déjà lu Griffintown de la même auteure, mais avec Soudain le Minotaure, on se trouve dans un autre niveau. Ce n’est pas une œuvre lumineuse. Toutefois, elle est utile surtout en cette période d'après #MeToo. L’agression d’Ariane se produit dans les années 90, mais pourrait très bien se dérouler de nos jours. J’aime les romans qui se passent dans cette décennie chère à mon cœur. Maintenant, je vois cela d’un autre œil.

Le livre est séparé en deux parties : celle d’Ariane qui raconte ce qu’elle a vécu pendant et après l’agression et celle de son agresseur Mino. Je donne une étoile à l’écrivaine pour la seconde partie qui n’a pas dû être évidente à écrire. J’avais l’impression d’être dans sa tête et c’est un point de vue qu’on retrouve peu dans les romans. Bien que les chapitres de Mino m’aient fait frissonner, ceux d’Ariane m’ont touché davantage. L’auteur a tellement bien décrit sa peur et sa peine que je voulais la serrer dans mes bras. J’ai bien aimé les dialogues avec des phrases dans une autre langue et d’avoir pu visiter brièvement l’Allemagne malgré qu’elle tentait de reprendre le dessus. Dans tous les personnages, c’est le frère d’Ariane qui est mon préféré. Il reste à ses côtés, peu importe ce que sa sœur vivait.

L’écriture touche directement le coeur, mais avec des intermèdes permettant au lecteur de respirer. D’ailleurs, j'apprécie que la musique, les descriptions des divers environnements soient présentes, cela ajoute un peu de lumière à un récit difficile. Bien qu’on se mette dans la tête de Mino, je n’ai pas ressenti de l’empathie pour lui et on n’en fait pas l’éloge. C’est seulement pour nous expliquer à quoi il pensait lors des événements.

Je le recommande si vous aimez lire des livres avec des points de vue hors du commun et qui vous feront vivre des émotions en montagnes russes. C’est une œuvre qui vous fera réfléchir.

Extrait

Plusieurs fois par jour, le film de mon agression joue à toutes les chaînes de ma télé intérieure. Et quand le film commence, je deviens tétanisée et je ne peux m’empêcher de la visionner, une fois de plus, scène par scène en attendant la fin, puis le repos. Le seul truc que je connais pour y remédier est d’ouvrir les yeux et de dire « stop » à voix haute. Et d’allumer la lumière, même pour dormir.


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