samedi 11 février 2023

Pour que demain s’empare de nous de Julie Bosman

 

Publié chez les éditions Leméac le 1 février 2023

212 pages

4e de couverture

Années 90. Trois jeunes adultes, représentants désillusionnés de la génération X, traînent à Montréal leurs blessures et leurs rêves tout en cherchant le mode d’emploi d’un monde dans lequel ils ne se reconnaissent pas.

Une voix est ici donnée à Julie, prisonnière de son héritage familial, à Mélanie, intellectuelle féministe, et à Laurent, drop-out passionné de photographie. Le trio d’amis, qui s’étourdit aux Foufounes électriques et enfile les joints, est plongé au cœur d’événements marquants : le féminicide de Polytechnique, la chute du mur de Berlin, la guerre du Golfe, le combat de Chantal Daigle pour le droit à l’avortement, les émeutes de Los Angeles...

La musique de Radiohead, Plume Latraverse, Robert Charlebois, Richard Desjardins, Pink Floyd, Bérurier Noir, Rage Against the Machine, Daniel Bélanger accompagne les protagonistes et donne un rythme fascinant à ceroman emblématique d’une époque pas si lointaine, où planait le spectre du nouveau millénaire.

Mon avis

L’histoire se déroule de 89 à 92 avant de terminer en 1999. Je n’ai que quelques souvenirs du début de la décennie puisque j’étais très jeune, mais ce n’était pas nécessairement plus facile que de nos jours. En parcourant les pages de cette œuvre, j’ai réalisé que chaque décennie fait face à son lot d’épreuves et que chacun d’entre nous fait de son mieux pour s’en sortir.

En lisant la 4e de couverture, j’avais l’impression que l’histoire ressemblerait à La déesse des mouches à feu, mais avec des personnages un peu plus âgés.  L’atmosphère est semblable. L’amitié, la recherche d’identité, le passage à l’âge adulte sont des thèmes abordés au fil des chapitres et bien que je ne fais plus partie de ce groupe, j’ai aimé replonger dans cette époque lorsque la technologie prenait moins de place, mais les jeunes adultes devaient affronter différents problèmes. C’est vraiment la musique qui m’a donné envie de me procurer le livre et noter mes nouvelles découvertes, car plusieurs chansons mentionnées m’étaient inconnues.

Je donne mon étoile du match à Mélanie, dans la bande d’amis, c’est le personnage dans lequel je me suis davantage reconnue. J’ai adoré son côté féministe qui ne se laisse pas marcher sur les pieds. Elle aide Julie à traverser un moment difficile, un thème important à aborder. Je garde le suspense.

Je suis reconnaissante que l’auteure mentionne des événements historiques marquants qui se sont déroulés pendant cette période. J’en ai entendu parer aux nouvelles et dans les cours d’histoire, mais j’ai aimé le voir d’un point de vue d’une personne adulte qui les vivait. 

Je tiens toutefois à vous aviser que l’écriture est assez crue. Les thèmes abordés ne sont pas une marche tranquille sous le soleil. Je m’y attendais après avoir lu le derrière du livre et je dirais que c’est un autre point en commun avec l’œuvre de Geneviève Pettersen.

Extraits

Demain des clients rugiront dans ses oreilles, demain elle essaiera de ne pas vomir en poursuivant son mémoire de maîtrise, demain elle se disputera avec son chum. Des. Des décisions. Des changements. FUUUUCK! (p.18)

Ceux que sa grande gueule n’intimidait pas finissaient assez rapidement par critiquer ce qui les avait allumés. Se passionner, revendiquer, exiger, militer, augmenter, contester, jurer est suffisant pour que fuse le reproche. La colère, la révolte, l’insoumission, ça ne sied pas à une femme. C’est vulgaire et pas très joli. Mesdames, serrez les lèvres et ouvrez les jambes (p.27)

Sa mère lui avait appris à ne pas se réjouir à l’avance. Les déceptions sont ainsi potentiellement moins nombreuses et moins douloureuses. Sa devise : garder ses aspirations pour soi et s’attendre au pire. (p.38)

D’autant que Julie, Laurent, Mélanie et leurs amis fêteront leurs vingt ans en 1990, mais ils ne regardent pas en arrière pour tirer des leçons, aiguiller la suite, apprendre de leurs erreurs. Le monde non plus, d’ailleurs. Que dit-on déjà : plus ça change, plus c’est pareil? (p.69)

Après avoir passé son adolescence à lire des romans d’amour convenus, clichés, stéréotypés, elle entend de nouvelles voix qui ne refusent ni la fragilité, ni la fêlure, ni la faille, ni l’abandon, des voix venues de l’intérieur de la nuit, et, pourtant, illuminées d’éclats d’humanité qui l’invitent à rendre son moi poreux, sensible, présent, attentif. (p.151)

 

 

 


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