Biographie
Détentrice d'un baccalauréat en psychoéducation, Valérie Langlois a
travaillé pendant près de vingt ans dans le milieu de la déficience
intellectuelle avant de se consacrer à l'écriture. Elle est l'auteure de deux
romans historiques publiés chez VLB : Culloden – La fin des
clans (2011, sélection de Québec Loisirs et de France Loisirs) et La
Dernière Sorcière d'Écosse (2014, sélection de Québec Loisirs). Boursière
du CALQ en 2012, elle a obtenu le prix Philippe-Aubert-de-Gaspé (au Salon du
livre de la Côte-du-Sud) en 2015. En 2019, elle fait paraître La Page
manquante, inspiré de son vécu. Là où tombent les samares est son
deuxième roman publié chez Libre Expression. Elle est également l’auteure de deux
albums jeunesses parus en 2019, Beau dodo (Dominique et Compagnie) et
Fripouille ! (éditions Le Point Bleu). En 2021, elle co-dirige et participe
au recueil de nouvelles Murmures paru
aux éditons Les Heures Bleues.
Crédit : Valérie
Langlois : écrivain, auteur | Libre Expression (editions-libreexpression.com)
Questions
D’où vient ton intérêt pour l’Écosse?
D’aussi loin que je me souvienne,
j’ai toujours eu une fascination pour ce pays. Entre autres, lorsque j’étais enfant,
mon père possédait une collection d’ouvrages Larousse, et chaque volume
représentait un pays particulier. Moi, je retournais toujours dans les pages du
livre sur le Royaume-Uni, spécifiquement la partie sur l’Écosse pour regarder
les images représentant des falaises, des champs de bruyère et des châteaux. Je n’étais même pas en âge de me figurer à
quelle distance de chez-moi pouvait bien se trouver ce bel endroit, mais cette
attraction n’a fait que s’accentuer au fil du temps. Les mythes et légendes se
sont mis à me fasciner, la cornemuse à vibrer en moi, j’ai été happée par les
héros écossais. Je me suis plongée dans
la lecture de romans celtiques, j’ai vu plein de films qui étaient tournés
là-bas. J’en rêvais! C’est lors de mon premier voyage en Écosse, en 2012, que
j’ai pleinement compris la signification de leur slogan touristique : This
is Home.
Quels défis as-tu rencontrés
lors de l’écriture de ton premier roman?
Je m’attaquais à un bien gros morceau en
choisissant d’aborder la bataille de Culloden Moor et ses conséquences sur le
peuple écossais. Le passé de l’Écosse est particulièrement complexe et je n’étais pas pleinement consciente de la
galère dans laquelle je m’embarquais. Je possédais des connaissances
historiques de base, certes, mais j’avais un bon bout de chemin à faire pour
mettre ma culture à niveau. J’ai dû faire l’acquisition de plusieurs livres sur
le sujet, j’ai passé de (trop) nombreuses heures sur Internet à valider et
revalider mes nouvelles connaissances. Avec beaucoup de difficulté, j’ai même
réussi à trouver aux États-Unis une dame de descendance écossaise qui est ma
traductrice de gaélique depuis.
Écrire La dernière sorcière
d’Écosse fut beaucoup plus facile, puisqu’après Culloden; la fin des
clans, la bourse du CALQ m’a permis d’aller visiter l’Écosse deux fois.
J’en suis revenue avec beaucoup de livres, de documents, j’y ai fait de la
recherche sur le terrain, j’ai visité les lieux spécifiques à l’histoire. J’ai
même fait arrêter un chauffeur d’autobus pour voir le château de Menzies, même
s’il n’était pas sur notre itinéraire! Le récit de La Sorcière est beaucoup
plus tangible pour les lecteurs, j’espère que j’ai réussi à insuffler à cette
aventure l’atmosphère écossaise de l’époque.
Est-ce que tu fais des
recherches avant de te lancer dans l’écriture d’un nouveau livre?
Pour mes romans historiques, oui.
Il faut être dans le bon contexte, chronologiquement cohérent, il faut que les
vêtements, les armes, les politiques concordent avec l’époque, bref, on est en
recherche avant, pendant et après! C’est beaucoup plus de temps passé le nez
dans les bouquins que sur le clavier, je dirais. Et souvent, je suis arrêtée en
plein élan de création par un détail que je pourrais laisser de côté pour y
revenir plus tard, malheureusement je suis mal faite et mon esprit reste figé
sur ce détail que je dois absolument vérifier maintenant!
Quand est venu l’heure de débuter
La dernière sorcière d’Écosse, j’ai commencé à classer les mythes et
légendes, et je suis tombée sur l’histoire véridique de Janet Horne. À partir
de là, mon imagination s’est emballée, tout concordait, à partir de sa fille
qui aurait un bébé de l’âge de Brodick et de toutes les aventures qui suivraient.
Elles ont toutes une partie véridique sur lesquelles j’ai pu me baser : la
mine de sel sous l’Abbaye, les hommes de sel, Mary King’s Close, pour ne nommer
que celles-là. Tous ces détails incluaient leur lot de vérifications.
Pour mes romans contemporains, j’opte
plutôt pour faire mes recherches au fur et à mesure que le récit avance, quand
le besoin se présente. Pour être honnête, je croyais naïvement qu’il serait
plus simple d’écrire une histoire moderne qu’un roman historique. Pensez-y un
instant, quoi de plus facile que de faire sortir un téléphone cellulaire de la
poche d’un personnage plutôt que de lui faire faire mille et un détours pour
faire parvenir un message à quelqu’un à dos de cheval? Finalement, il n’en est
rien. L’aspect psychologique de mes personnages m’obsède tellement que je me
retrouve à creuser très loin dans leur cheminement et leurs émotions. Je
m’inspire de ma formation universitaire en psychoéducation et je visite plein
de sites de psychologie pour comprendre leur façon d’interagir et de réagir. Quand
est venue l’heure d’écrire les scènes entre Emma et son psychologue dans Là
ou tombent les samares, j’ai fait beaucoup d’exploration sur le deuil
post-natal et d’autres phénomènes s’y apparentant parce que je tenais à ce que
ces chapitres soient crédibles et traduisent un véritable échange entre une
cliente et un professionnel. Finalement, peu importe quel genre d’histoire j’écris,
elles ont toutes leur défi, même les albums jeunesse.
Ton roman La Page manquante
est inspiré de ton vécu, est-ce qu’il s’agit d’une autofiction?
En effet. En 2014, j’ai été
victime d’une encéphalite auto-immune causée par un rare anticorps. J’ai passé
6 mois à l’hôpital, dont 6 semaines dans le coma, puis deux mois en centre de
réadaptation. Le pronostic était très sombre, personne ne croyait que j’allais
ressortir de cet hôpital sur mes deux jambes et avec toute ma tête.
Écrire, c’est une thérapie en soi.
Coucher mon histoire sur papier a été une façon de l’arrêter de tourner en
boucle dans ma tête, car j’y pensais constamment. Par peur d’oublier, peut-être,
car j’ai perdu les mois précédent ma maladie. Je ne me souviens plus de ma
première date avec mon mari, ni de notre premier baiser. Alors l’écrire,
c’était une façon de tout figer sur papier pour ne plus rien manquer. C’était
une manière d’expliquer aux gens ce qui m’est arrivé, de parler d’espoir et de
résilience face aux maladies orphelines.
J’ai écrit La page manquante de façon
romancée avec un brin de fiction et d’humour pour rendre le tout moins
dramatique et plus intéressant aux yeux du grand public. Après tout, je ne
crois pas que la biographie de Valérie Langlois aurait fait fureur au palmarès!
J’ai donc voulu parler de la réalité hospitalière du point de vue d’un patient
en y mettant émotion et anecdotes savoureuses, et en y laissant parfois mon orgueil.
Quels conseils donnerais-tu à
un nouvel auteur?
Trouver sa propre voix.
Chaque auteur doit trouver sur
quel ton il va aborder son sujet pour éviter d’en faire une histoire monotone.
Et dix auteurs différents abordant la même histoire y apporteront dix voix
différentes. C’est la beauté de la chose.
Votre voix d’auteur, c’est votre
signature, comme une empreinte digitale. C’est ce qui fera que vous vous
démarquerez de tous vos collègues.
L’important, c’est d’éviter de se
calquer sur quelqu’un qu’on admire, ou d’essayer un style qui ne vous va pas.
Cela dit, rien ne vous empêche d’explorer.
Mais quand vous aurez trouvé
votre voix, que vous serez sur votre X, l’énergie qui en émergera sera
ressentie par vos lecteurs, et c’est là que la magie opérera!
Quelles sont tes sources
d’inspiration?
Je suis quelqu’un qui observe
beaucoup et qui absorbe l’information. Par exemple, quelque chose que j’ai vu
en Écosse, il y a 10 ans, disons un pub, pourrait me servir dans un récit
demain matin. C’est rangé dans un tiroir de mon cerveau, prêt à être utilisé.
J’aime également m’inspirer des histoires
humaines qui m’ont émue.
Je citerais en exemple la vie et
la mort d’Idgie, inspirées de ma grande amie Brigitte, malheureusement décédée
avant la sortie de Là ou tombent les samares. Pendant la rédaction du
roman, Brigitte et moi avons beaucoup échangé sur les émotions que sa maladie
lui faisait vivre, ses peurs, comment elle voyait la mort. Elle y mettait aussi
beaucoup d’humour. Cette expérience m’a personnellement changée pour toujours. Ça
m’a apporté un nouveau point de vue sur l’après.
L’histoire de deuil post-natal de
l’héroïne, elle, me vient des souvenirs d’une amie proche qui a vécu une
expérience de ce genre, il y a 15 ans. Je me souviens de façon très claire des
funérailles de ce petit bébé et cette fois, avec l’accord de la maman, ça a
servi à enrichir l’histoire de mon Emma.
Parfois, même, je me réveille au
milieu de la nuit avec une idée. Si je ne la note pas immédiatement, au matin
je l’aurai oubliée, alors je garde un calepin sur ma table de chevet.
Quels sont tes prochains
projets?
Actuellement, je suis en
convalescence après une récidive d’encéphalite en 2021.
Pour mes prochains projets, je
dois dire qu’entre deux, mon cœur balance. J’hésite vraiment entre retourner à
mes premiers amours, l’historique écossais, ou continuer dans les romans plus
contemporains. J’adore écrire dans les deux styles alors je voudrais avoir deux
têtes et quatre bras pour faire les deux à la fois!
Tout ce que je peux dire, c’est
que j’ai de bonnes idées, et que j’ai hâte de retourner à mon clavier!
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